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Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Cession de brevet : le bon vouloir du cessionnaire n’a pas sa place dans le contrat !

Avocat brevetL’exécution d’une obligation peut être conditionnée à la survenance d’un évènement. Lorsque la réalisation de ce dernier dépend exclusivement de la volonté d’une des parties on parle de condition potestative (ex : tu me donnes 10 euros et, en contrepartie, si j’ai envie, je te donne une pomme : le transfert de la pomme étant soumis au bon vouloir de son détenteur, la clause est nulle). S’il s’avère que cette dernière est le débiteur, l’obligation est nulle afin de ne pas soumettre le créancier à son arbitraire.

 

L’arrêt rendu le 21 avril 2017 par la Cour d’appel de renvoi de Paris illustre parfaitement cette règle résultant désormais de l’article 1304-2 du Code civil.

En l’espèce, Monsieur Pascal R. avait cédé à la société R’Santé, pour le prix de 200 euros, les droits d’exploitation sur l’une de ses inventions permettant, par le biais d’un substitut, de réduire la quantité de sel dans le pain et les pâtes alimentaires. Il avait également été prévu qu’un complément de prix de 18 600 euros devait être versé par le cessionnaire sous réserve de l’obtention par ce dernier d’un brevet européen.

En 2009, Monsieur Pascal R. a demandé la nullité de la convention par laquelle il avait cédé son invention au motif que son engagement était dépourvu de cause. Pour lui, le prix de 200 euros versé par la société R’Santé pour acquérir les droits sur son invention était dérisoire et la clause prévoyant le versement d’un complément de prix, seul susceptible de rééquilibrer les rapports contractuels entre les deux parties, était nulle en raison de son caractère potestatif. Elle était en effet soumise à la réalisation d’une condition suspensive dont la survenance dépendait exclusivement de la volonté de son débiteur, la société R santé, puisque seule cette dernière avait la capacité de procéder au dépôt du brevet européen.

En 2011, la Cour d’appel de Saint Denis de la Réunion a débouté Monsieur Pascal R. de ses demandes au motif que la société R’Santé avait procédé au dépôt du brevet européen et que « la décision d’obtention » ne dépendait « pas à l’évidence de la société R’ Santé ».

L’affaire a finalement été portée devant la Cour de Cassation, qui, par un arrêt du 28 mai 2013, a cassé l’arrêt de la Cour d’appel au motif que cette dernière n’avait pas recherché si, aux termes du contrat, « il ne dépendait pas de la seule volonté de la société R’santé de maintenir ou de retirer la demande de brevet européen ».

Le 28 mai 2015, Monsieur Pascal R. a saisi la Cour d’appel de renvoi de Paris qui a statué par un arrêt du 21 avril 2017. Entre temps, la société R’Santé a finalement obtenu le brevet européen. Dès lors, la question du caractère potestatif de la clause litigieuse se posait à nouveau puisque la condition suspensive à laquelle elle était soumise venait de se réaliser faisant ainsi naître l’obligation qu’elle prévoyait.

La Cour d’appel de renvoi a cependant accueilli la demande de nullité de Monsieur Pascal R.. Elle a rappelé que la validité d’un contrat devait s’apprécier au jour de sa formation et que, par conséquent, le fait qu’un brevet européen ait par la suite été obtenu était sans effet sur le caractère potestatif de la condition suspensive en cause, nulle en application de l’ancien article 1174 du Code civil, remplacé par l’article 1304-2 du même Code.

A noter également que la société R’Santé a été condamnée à verser à Monsieur Pascal R. la somme de 45.000 euros à titre de dommages et intérêts, et que Monsieur Pascal R. a, pour sa part, été condamnée à verser à la société R’Santé la somme de 12.765 euros au titre des dépenses nécessaires et utiles engagées par cette dernière avant l’annulation des contrats pour la protection de l’invention par des brevets ces derniers profitant désormais à Monsieur Pascal R..

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