Skip to content
Avocat Nantes La Roche sur Yon Paris

Non, mais c’est une blague ?

Avocat droit d'auteurTwitter a accepté de faire droit à la demande d’une tweeteuse réclamant, via un formulaire de notification en ligne, le retrait de messages publiés sur le réseau social, reprenant ses blagues. Sur quel fondement ? Le droit d’auteur.

 

En effet, en lieu et place des tweets « contrefacteurs », le message suivant s’affiche désormais : « Ce tweet a été retiré suite à une notification du détenteur des droits ».

Est-il donc véritablement possible de revendiquer la protection d’une blague tweetée au titre du droit d’auteur ? Cette question appelle deux séries d’observations.

En l’espèce, le message humoristique, conformément à la politique de Twitter, n’excédait pas 140 caractères. Or, le Code de la propriété intellectuelle (CPI) indique qu’une œuvre n’est protégeable que lorsqu’elle est originale et porte donc l’empreinte de la personnalité de son auteur. Est-il possible de considérer qu’en moins de 140 caractères, l’auteur d’un tweet peut faire rejaillir l’empreinte de sa personnalité ?

En réalité, la loi précise que sont protégeables « toutes les œuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination ». Il n’y a donc pas de critère relatif à la longueur de l’œuvre. Ont ainsi pu bénéficier de la protection par le droit d’auteur des titres (de livres par exemple) ou encore des slogans.

Néanmoins, il est certain que plus le texte sera court, plus il sera difficile d’y déceler la « patte » de son auteur.

 

Le droit d’auteur ne protège pas les idées brutes, à moins qu’elles soient matérialisées sous une forme perceptible. La frontière entre formulation d’une idée et matérialisation sous une forme perceptible par les sens est poreuse dans la situation qui nous intéresse. En effet, les nouveaux médias comme Twitter permettent l’expression d’idées (quasiment comme à l’occasion d’échanges oraux) qui sont, au sens strict, matérialisées par écrit mais dépourvues de véritable concrétisation formelle.

Au final, tout dépend du contenu du tweet : s’il est original il sera considéré comme une œuvre et son auteur pourra donc en interdire la reproduction. A l’inverse, il ne sera pas protégé. Ainsi, dans une affaire similaire concernant une anecdote humoristique publiée sur le site VDM, le Tribunal de grande instance de Paris a jugé que « l’anecdote suivante publiée sur le site […] n’est pas originale dans sa forme, la concision du texte et la structure du récit ne révélant rien de la personnalité de l’auteur, seul l’événement relaté ayant un intérêt, et l’idée qu’elle véhicule peut librement être reprise sans commettre d’atteinte au droit d’auteur de celui qui l’a publié » (TGI Paris, 22/05/2014).

En tout état de cause, Twitter a privilégié la prudence et, conformément à ce que lui impose la loi en qualité d’hébergeur, a retiré le tweet notifié comme litigieux, sans pour autant en analyser le caractère réellement protégeable au titre du droit d’auteur. Pour cause, Twitter n’est pas juge.
Il serait en tout cas for intéressant que la question, concernant un tweet, soit soumise à une juridiction …

A lire aussi...